De quoi se requin-quer
Les excès des fêtes de fin d'année vous ont ruiné la santé. Non, ne niez pas, votre œil vitreux et votre teint cireux vous trahissent. Pas de discussions, on vous prend en main : cure de poisson pour tout le monde. Diététique, plein de bons oméga 3, c'est l'aliment idéal pour vous requinquer et éliminer les toxines. Pendant les semaines à venir, on vous parlera donc de poisson, ce qui, compte tenu de notre "amour" pour les créatures aquatiques en général, relève du masochisme ; mais la santé n'a pas de prix. Commençons par un traitement de choc en suivant l'adage "ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort", avec une spécialité islandaise : le Hákarl. Fraichement rapporté d'Islande par WR, que nous remercions et maudissons au passage, ce met traditionnel est de la viande de requin du Groenland faisandée. Ce requin n'évacue son urine qu'en suant, du coup évitez d'aller à la piscine avec lui. Cette particularité fait que sa chair fraiche a une forte teneur en acide urique et est toxique. Une longue préparation est nécessaire pour la rendre consommable : le requin est notamment enterré 6 mois dans le sol, les chairs putréfiées sont ensuite séchées plusieurs mois. Je sais ça donne envie.
Le Hákarl est réputé pour être un des plats les plus immondes au monde, tant par son odeur très forte que par son goût. Vous pouvez trouver sur le net de nombreux témoignages de personnes ayant tenté l'expérience, et tous sont unanimes sur ce point. Avant même d'avoir ouvert le sachet, on a très vite compris que rien n'est exagéré. L'odeur est si forte qu'elle passe à travers l’emballage hermétique lui-même enfermé sous quatre épaisseurs de sacs plastique, j'ai d’ailleurs même été pris de nausée en ouvrant le paquet. Cela en fait l'arme ultime lors des régimes : un petit bout dans votre frigo et vous hésiterez vraiment à l'ouvrir pour grignoter. Imaginez un local poubelle bien odorant, ajoutez un fort fumet de poisson pourri et un zeste d'urine et enfin arrosez le tout d’ammoniaque, vous aurez une petite idée de l'odeur. Pour couronner le tout, l'odeur est persistante, même avec les fenêtres ouvertes, le bureau qui a accueilli la dégustation a embaumé toute la journée, nos collègues s'en souviennent encore. Le durian fait petit joueur en comparaison. Je me demande si la convention de Genève n'en interdit pas son utilisation lors des conflits armés.
Rien qu'à l'odeur, on imagine le pire quant au goût. D’ailleurs peu de téméraires ont osé tester. Dès la première bouchée, le constat est fait : c'est mauvais et la texture est désagréable, on sent que ça va être dur d'avaler. Contrairement à ce que l'on pense, les morceaux ne sont pas mous et gélatineux. La consistance est étrange et difficile à définir, un peu dure, élastique et fibreuse, forcant à croquer à pleines dents. Le goût est moins fort que ce qu'on pouvait craindre au regard de l'odeur, mais il n'est reste pas moins puissant. Ce qui ressort le plus est un fort goût d'ammoniaque, qui pique un peu et imprègne bien les muqueuses, il reste du coup encore perceptible plusieurs minutes après. Il est couplé à un sale goût de poisson pas frais pas si prononcé que ça, et tout de même supportable. On a vraiment affaire à une petite immondice, et il est dur d'en manger beaucoup sans avoir la nausée. Après une telle expérience, on peut se permettre de parader fièrement avec une tasse indiquant qu'on a survécu au Hákarl.
Verdict :
Giraf
L'odeur est sans commune mesure et fait passer le durian pour une délicieuse brise de printemps. Par contre j'aimerais pouvoir dire que ce requin est la chose la pire que j'ai gouté mais malheureusement non. Les boissons au placenta et les vers à soie bouillis en conserve le surpassent dans l'horrible. Il mériterait presque un jambon de porc face à de tels concurrent, mais écope tout de même de la note la plus basse, un demi jambon (faisandé) et laissera un souvenir impérissable dans ma vie de testeur.
Kephy
Si vous avez une dent contre un collègue ou autre belle mère, ne cherchez plus, votre vengeance est toute trouvée. A peine le paquet ouvert, l'ensemble du bureau dans lequel, heureusement, je n'ai pas eu à rester tout l'après-midi, a été parfumé à l'huile essentielle de concentré de port de pêche. Pour rester correct, ça schlingue sévère, et les mots sont faibles. Cependant, au contraire de la Vegemite ou de la boisson au placenta, cette odeur est naturelle et identifiable. Ce n'est pas forcément une bonne chose, car manger du poisson avarié ne fait pas partie de mes priorités dans la vie.
En plus de repousser par son odeur, ce requin oppose une résistance quand on essaye de lui planter une fourchette dans la chair, il faut forcer pour qu'elle rentre progressivement. Ce deuxième avertissement n'était pas un coup de semonce, car le goût de ce poisson est immonde et vomitif. Je n'ai pas pris le temps de l'analyser en détail, balayant le morceau à grand renfort d'eau pour faire passer. Je suis d'accord avec Giraf pour dire qu'on a connu pire, mais ce requin ne mérite pas pour autant plus d'un demi jambon de porc.
PS : Rapporté d'Islande par WR et Aline.
Ah ah ! Plus d’un an que je t’en parlais, et que je te l’avais promis.
L’odeur de mon sac après le voyage de retour était bien fidèle aux « délicieux » souvenirs de dégustation … content que ça t’ait plu !
Mon nez s’en souviendra aussi.
PS : j’arrive à répondre à ton commentaire presque 1h AVANT que tu ne le postes 😀 😀
:marty mcfly:
Eh ça sent d’ici :-p
Mais vous l’avez mangé cru ?
enfin, sans l’avoir cuisiné ?
Ça se consomme tel quel. C’est ni vraiment cru ni vraiment cuit.
En Islande ils mangent les petits cubes en apéro.
…
accompagné d’alcool très fort ?
Le brennivín est un exemple d’alcool islandais pouvant faire l’affaire 😉
j’en ai mangé directement en Islande.
Le Brennivin est un élément INDISPENSABLE pour pouvoir apprécier le hakarl. L’un sans l’autre : c’est dégueulasse. Mais étrangement, les deux ensemble… eh bien ça passe beaucoup mieux !
Mon ex-femme ne m’avait plus embrassé de la journée après la première dégustation. Première ? Oui, oui, on peut y prendre goût !
Donc, je pense que vous devriez en regoûter selon les usages Islandais, avant d’écrire de nouveau un article complet rempli de mots aussi dégoûtants 🙂
Depuis l’article, je suis allé deux fois en Islande, et j’ai eu l’occasion d’en regoûté, avec du Brennivin cette fois. On ne peut pas dire que c’était bon, mais c’est un peu moins pire.
[…] Contact « De quoi se requin-quer […]
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Ben moi j’ai bien aimé ^^. J’avoue, j’avais que 4 petits cubes, mais ça suffit déjà pour bien déboucher le nez :-). C’est vrai que c’est surprenant, c’est comme si 4 ou 5 ingrédients sans aucun lien (dont différents poissons et fromage bien vieux) avaient été réunis en un seul petit cube.
(testé il y a 4 jours, avec et sans Brennivín)
Bravo, c’est rare que quelqu’un dise ça, surtout pour une première dégustation.
Même après 4 fois j’ai toujours du mal.
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